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'L'Europe de Hitler'
 
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L'Europe de Hitler

Le nouvel ordre européen instauré par l'Allemagne hitlérienne s'appuie sur des régimes semblables à travers toute l'Europe. Il y a en Yougoslavie occupée un "Pétain" serbe, le général Nedic; un autre général en Grèce, en Roumanie le maréchal Antonescu, en Hongrie l'amiral Horthy. En Slovaquie un prêtre, Tiso, dirige un Etat proclamé autonome par Hitler à Berlin dès 1939.

Comme Vichy, ces régimes partagent certaines affinités avec le fascisme, mais ne sont pas non plus des régimes fascistes. Leur politique est contestée, à l'intérieur même de chaque pays, par des partisans déclarés du fascisme et d'une alliance plus étroite avec l'Allemagne nazie.

En France, ces collaborationnistes sont des "partis autorisés" (seulement en zone nord) par l'occupant: Parti populaire Français de l'ex-communiste Doriot, Rassemblement National populaire de l' ex-socialiste Déat, Francisme, venu de l'extrême-droite. Ensemble, ils créent une Légion des Volontaires Français (LVF [1] ) contre le bolchevisme, pour combattre sur le front de l'Est au sein de la Wehrmacht. Leur propagande incite les jeunes Français à s'engager dans la Waffen SS. Ils fournissent à l'occupant des auxiliaires dans la chasse aux réfractaires du STO et la répression de la Résistance. Ils ne cessent de se disputer entre eux. Ceux qui accèdent au pouvoir à Vichy, en 1944, y demeurent minoritaires.

Après l'invasion de l'URSS par l'Allemagne en 1941, des collaborationnistes créent une Légion des Volontaires Français (LVF [2] ) contre le bolchevisme, pour combattre sur le front de l'Est au sein de la Wehrmacht.

 

 


Source Internet [3]

Le régime se fascise aussi de l'intérieur, à mesure que l'occupation se fait plus dure, les exigences allemandes plus draconiennes, et que l'opinion lui échappe. Les forces de répression y tiennent une place de plus en plus grande. Les accords du secrétaire général à la police Paul Touvier avec le chef des services de sûreté allemands en France (Sicherheitsdienst) Oberg [4] , en 1942, associent étroitement les deux organisations policières dans la lutte contre les Résistants. En 1944, la milice - organisme créé hors de son sein début 1943 - est intégrée à l'appareil policier d'Etat. Son chef Joseph Darnand est nommé secrétaire d'Etat au maintien de l'ordre. Vichy est devenu un Etat policier.

Les fascistes locaux n'occupent d'emblée la direction de l'Etat qu'en Croatie, avec le chef des Oustachis Ante Pavelic. Ils y accèdent en Norvège avec Quisling dès 1941. Ils participent au gouvernement aux côtés des forces politiques traditionnelles, en Slovaquie, en Roumanie. Ils y entrent en Belgique, comme en France, lorsque l'occupant allemand doit renforcer son emprise sur les territoires et les populations soumises à la pression des nécessités croissantes de la guerre. Les Croix fléchées relaient en 1945 seulement les traditionalistes défaillants de Horthy en Hongrie. Tandis qu'en Italie, chassé du pouvoir en 1943 par le retournement du roi et du chef de l'armée Badoglio en faveur des alliés débarqués, Mussolini crée la République fasciste de Salo.

Hitler préfère avoir pour partenaires dans les pays dominés des hommes comme Pétain. Trop faibles pour s'opposer à cette domination, mais assez implantés dans les sociétés nationales - au contraire des collaborationnistes - pour la faire accepter. La collaboration d'Etat pratiquée par Vichy et ses homologues européens s'inspire d'une profonde illusion. Ils croient cette collaboration utile à la sauvegarde de la souveraineté nationale et à la préservation des intérêts de leur pays. En réalité ils servent seulement - au détriment de ces intérêts nationaux - la politique de Hitler. Ce que le maître de l'Europe occupée ou satellisée attend d'eux, c'est qu'ils fassent supporter à leurs compatriotes, sans se révolter, le poids de l'exploitation qu'il leur impose.

Le nouvel ordre économique: Le nouvel ordre européen est aussi d'ordre économique. L'impérialisme allemand, réactivé par les nazis, vise l'intégration des économies nationales européennes dans un cadre élargi à l'ensemble du continent. L'objectif est de construire autour de l'Allemagne - et de l'Europe moyenne (Mitteleuropa [5] ) intégrée au Reich allemand - une entité économique capable de peser sur le monde en faveur de l'Allemagne face aux Anglo-saxons et à l'Eurasie soviétique. L'expansion de l'espace vital (Lebensraum) allemand à l'Est, au détriment de la Russie soviétique, devant par ailleurs affaiblir celle-ci - et abattre en même temps le bolchevisme.

"In der nationalsozialistischen Politik wurde Mitteleuropaidee zur Rechtfertigung der Vorherrschaft der "germanischen Herrenrasse" in Europa missbraucht, mit den bekannten schwerwiegenden Folgen für Europa und die Welt." (W. J. Mommsen [6] )

Source Internet [7] (Illustr.)

L' exploitation économique de l'Europe passe par des taux de change léonins entre le mark et les monnaies des pays dominés; par des accords de compensation qui favorisent les approvisionnements allemands en différant leur paiement jusqu'à la victoire escomptée; par l'intégration des firmes nationales - françaises ou autres - dans des groupes européens dominés par les firmes allemandes; le monopole allemand IG Farben par exemple pour l'industrie chimique.

Réponse du chef de la Délégation économique allemande d'armistice à Wiesbaden Hemmen, au représentant des industriels français des colorants, le 21 novembre 1940, un mois après Montoire:

"Notre politique économique tient essentiellement compte des réalités. Votre industrie des matières colorantes est un de ces réalités… Vous existez, c'Est un fait, mais il faut que vous continuiez d'exister dans le cadre européen. Or, c'est aussi un fait que l'IG Farben a un rôle dominant sur le marché européen. Vous en devez donc pas être surpris que, tout en respectant votre existence, on vous demande de prendre la place qui vous revient dans le cadre de l'IG Farben…
Vous voyez que, replacées dans le cadre de notre programme de réorganisation européenne, ces propositions sont économiquement très avantageuses pour vous. Elles sont dans votre intérêt. Elles sont dans l'intérêt de l'IG Farben. Elles sont surtout dans l'intérêt de l'Europe: puisqu'il s'agit essentiellement de réorganiser le continent européen."

Source : document fourni par l'auteur

Cette intégration économique européenne, foncièrement inégalitaire, constitue l'objectif à long terme des dirigeants de l'Allemagne nazie. Mais celui-ci est parasité par les nécessités à court terme de la machine de guerre allemande. Tant que durent les succès de la guerre éclair, la guerre nourrit la guerre. Les prélèvements opérés dans les territoires envahis suffisent alors à satisfaire les besoins de la Wehrmacht. Ils garantissent aussi les populations allemandes contre une restriction de leur propre ravitaillement qui risquerait de les détacher du régime.

Le 18 février 1943, le ministre de la propagande du Reich Joseph Goebbels proclame publiquement la "guerre totale". Profitant de l'influence immédiate de la catastrophe de Stalingrad, il en appelle à la volonté d'endurance de la population allemande dans un discours énergique et frénétiquement applaudi par les 3.000 spectateurs choisis présents au palais des sports de Berlin.

Source Internet [8]

La guerre d'usure, imposée par l'échec devant Moscou en décembre 1941, oblige à une guerre totale. Elle est mise en place dès le début de 1942. Albert Speer [9] est alors chargé de concentrer tout l'effort allemand - et européen - de production de guerre; le Gauleiter Sauckel [10] de la fourniture de main d'œuvre, également à l'échelle européenne. Le chef de la SS Himmler [11] prend la direction de l'ensemble des services de répression et d'une partie des forces armées, constituée d'Allemands et d'Européens enrôlés dans la Waffen SS [12] . Le responsable de la propagande, Joseph Goebbels [13] donne, après Stalingrad [14] , à la notion de guerre totale une formulation globale (idéologique autant qu'économique): une guerre pour laquelle toutes les énergies sont mobilisées et menée sans limites contre l'ennemi.

Cela se traduit par une exploitation sans réserve des pays dominés, obligés de fournir une part croissante de leurs productions à l'occupant; et aussi une partie de leur main d'œuvre pour remplacer dans les usines allemandes les ouvriers mobilisés pour combler les hécatombes sur le front de l'Est.