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Auszüge aus einer Direktive des französischen Außenministers an den Hochkommissar im Saarland vom 17. Januar 1948

Aus: Rainer Hudemann unter Mitarbeit von Marcus Hahn, Quellen zur saarländischen Geschichte 1945-1959, i.V.

Projet d´instruction au Haut-Commissaire Francais en Sarre

Une instruction en date du 4 juillet 1947, adressé au Général Commandant en Chef Français en Allemagne, a précisé les lignes de la politique française en Sarre au cours des mois qui allaient suivre. Les dispositions permanentes de cette note demeurent valables ; cependant, au moment où les transformations d'ordre èconomique et politique voulues par la France sont en voie de réalisation, il apparaît nécessaire de compléter ces directives en fonction de la situation nouvelle.

Deux documents répondront à ce but:
Le premier d'ordre économique apportera les conclusions tirées par le Gouvernement des travaux de la Commission dite du "Plan de la Sarre". Le second d'ordre politique, est la présente instruction:

La politique française en Sarre doit s'inspirer de deux ordres de considération: d'une part, la consolidation des positions françaises, d'autre part, le libre développement de l'autonomie sarroise. Le maintien de l'équilibre entre ces deux tendances devra être la préoccupation constante de notre représentation en Sarre, dans le triple domaine économique, politique et culturel.

I°/- Au point de vue économique
Par ses mines de charbon, par son industrie sidérurgique, enfin, par l'ensemble de ses richesses industrielles, la Sarre représente pour l'économie française un complément important de sa capacité de production. Un des premiers buts doit donc être la remise en état et le développement des installations industrielles sarroises.

Cette tâche revêt un aspect délicat lorsqu'il s'agit de secteurs où à brève ou à longue échéance, la concurrence peut jouer entre la production française et la production sarroise: c'est notamment le cas de la sidérurgie. La France ne peut évidemment sacrifier ses intérêts propres aux intérêts sarrois. L'économie française ne doit pas se trouver atteinte par les dispositions qui seront prises en faveur de l'économie sarroise, aussi bien au point de vue des besoins de main-d'oeuvre, pour quelque temps encore plus urgents en Sarre qu'en France, qu'au point de vue des tarifs de transports et des prix à la mine ou à l'usine. De délicats problèmes de "taux de marche" vont se poser, nécessitant des arbitrages difficiles.

Si, d'autre part, la France doit préserver en Sarre des positions capitales, c'est-à-dire essentiellement les mines et le contrôle de la sidérurgie, il faut laisser aux Sarrois une place à l'intérieur des entreprises et sociétés où la majorité est maintenant française, notre politique devant être, avant tout, là comme ailleurs, une politique d'association. Il convient aussi d'empêcher l'éviction de Sarrois par les Français, dans toutes les affaires où des intérêts essentiels ne l'imposent pas.

D'une façon générale, les échanges commerciaux franco-sarrois devront être encouragés, de façon que le commerce de la Sarre s'oriente délibérement vers la France. Dans le même sens, les échanges avec tous les pays de l'Ouest et du Bassin Méditerranéen devront être développés au maximum.

II°/- Au point de vue politique
Telle qu'elle ressort déjà des directives antérieures, la politique française en Sarre est nette: il ne s'agit point d'annexer un territoire, ni même d'organiser une simple autonomie administrative à l'intérieur du territoire métropolitain. Sans constituer un état proprement dit, puisque l'ensemble des affaires extérieures de la Sarre est de la compétence française, la Sarre n'en est pas moins une entité politique parfaitement autonome, et les seules limites apportées à sa liberté de législation et de juridiction sont celles qui résultent du rattachement économique et des nécessités de la sécurité française.

Dans ces conditions, la politique française à l'égard de la Sarre peut se ramener aux objectifs suivants:
a) veiller au maintien de l'indépendance du territoire de la Sarre vis-à-vis du Reich, quelle que soit la forme politique que l'Allemagne prendra au cours des années à venir. Toute velléité de rapprochement avec un Etat allemand, quel qu'il soit, mettrait en effet immédiatement en cause le principe du rattachement économique et les avantages qui en résultent.
b) Développer les libertés publiques en Sarre. Il convient que les Sarrois se convainquent qu'ils ont vraiment la libre disposition de leur organisation collective. La France intervient pour les aider, pour favoriser leur reconstruction, la marche de leurs services publics, le perfectionnement de leur législation ; mais ce progrès de l'ordre politique et social doit se faire dans une atmosphère de libre discussion, grâce au développement d'un esprit public libéral. Le Haut-Commissariat s'attachera à marquer aux yeux de la population la différence essentielle qui sépare le régime d'occupation militaire du régime, théoriquement au moins, d'exception, qui impliquait de la part de l'autorité française des pouvoirs quasi discrétionnaires, la Sarre doit avoir le sentiment qu'elle est maintenant redevable à la France de l'exercice des libertés démocratiques et des garanties personnelles.
c) Garantir la bonne administration du territoire. Ce but sera d'autant mieux atteint que la France se gardera d'intervenir directement dans l'administration du territoire, et se montrera plus discrète. Il conviendra donc de réduire au minimum nos interventions. Une immixtion continuelle de la part des services français irait contre nos intérêts les plus évidents ; notre effacement sera, par contre, le meilleur stimulant de l'administration sarroise qui doit, dès maintenant, prendre nettement conscience de ses responsabilités.

Ces directives générales doivent guider l'usage que le Haut-Commissaire fera de ses pouvoirs.

Il s'efforcera de laisser le maximum de latitude aux autorités sarroises politiques ou administratives; l'article 5 du décret fixant ses attributions lui donne le moyen de réduire ses interventions au strict minimum, tout en réservant les droits reconnus à la France : le Haut-Commissaire peut laisser le Gouvernement Sarrois ou l'Administration Sarroise prendre des décisions en des matières qui normalement sont de la compétence française, quitte à rependre ensuite, s'il le faut, son droit de réglementation. Appliquée à des matières d'importance secondaire, cette méthode doit permettre und allègement du contrôle, sans pour cela en affaiblir la portée.

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III°/- Au point de vue culturel
Notre but est d'assurer à la culture française en Sarre, un développement constant ; mais il faut prêter attention au contre-coup que des mesures maladroites ne manqueraient pas de provoquer. Tout doit être mis en oeuvre pour éviter que des positions excessives n'éveillent un nationalisme qui pourrait trouver plus tard dans un renouveau du germanisme les encouragements dont il manque pour le moment.

La France a un intérêt évident à favoriser une coupure entre la Sarre et le reste de l'Allemagne. Toutefois, la force de liens traditionnels, les principes même de notre action en Sarre nous obligent à faire preuve du maximum de tact. Il nous faudra laisser jouer l'autonomie sarroise sans mettre ouvertement en avant l'influence française. Il importe de ne pas sacrifier par une propagande trop voyante les excellents atouts que sont les particularismes locaux.

[...]

Plus importante encore sera l'action à mener dans le domaine de l'enseignement. Tout en s'interdisant une immixtion directe dans l'organisation de l'enseignement sarrois, les autorités françaises devront exercer un contrôle efficace sur sa qualité et son esprit. Ce contrôle constituera la meilleure garantie d'avenir du "Centre d'Enseignement Supèrieur et de Recherches Scientifiques" de Hombourg. Grâce au bilinguisme, au concours de professeurs français et sarrois, et à une certaine équivalence des programmes, il sera possible de réaliser sur le plan de l'enseignement supérieur et de la formation des cadres une interpénétration des deux cultures qui nous attachera les Sarrois en même temps qu'elle contribuera au rayonnement de la France vers l'Allemagne rhénane.

Quel que soit le domaine auquel s'applique son action, le Haut-Commissaire s'attachera toujours à souligner la différence qui sépare le regime nouveau du régime de l'occupation militaire. Si nous ne savions pas marquer la transition et renouveler nos méthodes, si nous donnions l'impression d'introduire sous une autre étiquette la technique quelque peu pesante de l'occupation militaire, notre présence même ne pourrait dissimuler longtemps l'échec de notre politique. Au contraire, s'il tient bien en main un personnel actif et point trop étoffé, s'il intervient le plus discrètement possible, s'il évite tout ce qui pourrait froisser les susceptibilités et engager dans la voie de contrôles trop lourds ou de contraintes brutales, s'il sait aussi faire comprendre que c'est à la présence française que les Sarrois doivent la jouissance des libertés politiques et de l'autonomie administrative, le Haut-Commissaire doit atteindre les objectifs qui lui sont fixés par la présente instruction.

[...]

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