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'De la monarchie de la Renaissance à la monarchie absolue'
 
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De la monarchie de la Renaissance à la monarchie absolue

Le système politique de la monarchie absolue s'est déployé en France au cours d'un long processus. Après la phase de la "monarchie de la Renaissance", qui reposait davantage sur un consensus entre monarque, ordres et l'ensemble des sujets, et les signes précurseurs sous François Ier, la monarchie absolue se cristallisa de plus en plus nettement à partir de la seconde moitié du XVIème siècle dans une suite de graves crises internes marquées par le problème religieux qui se posa dans le cadre de la Réforme avec l'établissement du calvinisme [1] en France et par un état de guerre quasi-permanent. La crise de la monarchie et de la société ainsi que la forte perte d'autorité de la dynastie des Valois [2] au cours de la seconde moitié du XVIème siècle ont joué un rôle essentiel dans la formation et le fondement théorique de la monarchie absolue dans la mesure où elles furent la cause et l'occasion de réflexions théoriques sur l'Etat tendant à renforcer le pouvoir monarchiste central. Il s'agissait de mettre ce dernier en état de surmonter la profonde crise de la monarchie ainsi que de reconsolider la situation en politique intérieure et extérieure, ce qui sous le règne d'Henri IV [3] (1589-1610) fut dans une certaine mesure atteint après la fin des guerres civiles à connotation politique et religieuse de la seconde moitié du XVIème siècle.

Henri IV [4] (*1553 - †1610)
Après le décès d'Henri III, mort sans enfants, Henri de Navarre devint l'héritier légitime du trône. Son mariage avec Marguerite de Valois en 1572 fut l'occasion indirecte du massacre de la St-Barthélémy [5] le 24 août 1572 [6] au cours duquel des milliers de protestants furent tués. Henri de Navarre ne put échapper à la mort que par sa (re)conversion au catholicisme. Cela lui sauva certes la vie, mais lui coûta le soutien des Protestants. Malgré toutes les difficultés, il atteint son but en 1589: devenir Roi de France. Au cours de son règne, il parvint à mettre fin aux guerres entre Catholiques et Protestants et à continuer à étendre le pouvoir central en France.

Source Internet [7]

Le terme d'absolutisme [8] (en allemand Absolutismus [9] ) n'existait pas à l'époque. Il apparaît en France vers 1796. Il n'est devenu un terme politique que lors de la Restauration, donc après le Premier Empire (1804-1814, Napoléon Ier). Dans la recherche moderne ce terme est très fortement controversé. Le terme "absolu" dans le sens de puissance absolue, d'autorité absolue ou de pouvoir absolu du roi était cependant répandu depuis la fin du XVIème et au début du XVIIème siècle dans les ouvrages politiques et sur les théories de l'Etat.

La puissance absolue est, dans la définition qu'en donne le célèbre systématicien du Droit public Jean Bodin [10] (1529/30?-1596) dont l'ouvrage Les six livres de la République [11] (1576) acquit une importance extraordinaire (même au-delà des frontières françaises) pour le fondement théorique de la monarchie absolue, identique au pouvoir souverain et vice-versa. Bodin définit la souveraineté comme étant "la puissance absolue et perpétuelle [de l'Etat]". Mais la puissance absolue au sens de Bodin signifie aussi ceci: "[…] il faut que ceux-là qui sont souverains ne soient aucunement sujets aux commandements d'autrui, et qu'ils puissent donner loi aux sujets, et casser ou anéantir les lois inutiles, pour en faire d'autres: ce que ne peut faire celui qui est sujet aux lois, ou à ceux qui ont commandement sur lui. C'est pourquoi la loi dit que le Prince est absous de la puissance des lois, et ce mot de loi emporte aussi en Latin le commandement de celui qui a la souveraineté." [14 [12] ]

Une caractéristique essentielle de la souveraineté est donc que son détenteur n'est pas assujetti au droit positif et se situe au-dessus de celui-ci, car étant lui-même la source des lois il ne peut y être tenu. Le souverain détient donc le monopole de la législation, l'exclusive compétence de compétence. Mais le souverain est soumis au et ne peut modifier les lois que dans le cadre de celui-ci. Une autre caractéristique de la souveraineté réside dans le fait qu'elle est exercée à vie. Une personne élue ou nommée pour une durée déterminée n'est pas souveraine, mais seulement titulaire d'un poste ou mandataire. Enfin, la souveraineté est indivisible, car selon Bodin la caractéristique saillante de l'Etat, la souveraineté, ne peut au sens strict exister que dans la monarchie, "car nul ne peut être souverain en une République qu'un seul: s'ils sont deux, ou trois, ou plusieurs, pas n'est souverain". [15 [13] ]

"Les six livres de la République"
Jean Bodin est considéré comme l'un des plus grands systématiciens du droit public au XVIIème siècle. Dans son œuvre Les six livres de la République, il expose ses idées fondamentales sur la monarchie absolue. Pour Bodin, la puissance absolue du dirigeant est identique avec la puissance souveraine et vice-versa. Bodin définit la souveraineté comme étant "la puissance absolue et perpétuelle de l'Etat".

 

Source Internet [14]

Si dans cette formulation (et d'autres semblables) Bodin exprime avec une force jusque-là inconnue le monopole de la compétence législative appartenant au souverain, monopole dont découlent tous les droits revenant au souverain absolu, cependant son pouvoir n'est pas illimité et ne saurait être confondu avec l'omnipotence et encore moins le pouvoir arbitraire. Le prince souverain reste lié aux normes du droit divin et naturel. Il en résulte entre autres l'obligation de respecter, en principe, la "liberté naturelle" et la propriété de chacun. Il n'a le droit de toucher à la propriété des sujets qu'en cas d'extrême menace pour l'Etat et ce uniquement dans l'intérêt public et pour le bien de l'ensemble de la communauté. Le souverain est également lié aux lois fondamentales du royaume (leges imperii), parmi lesquelles la Loi salique [15] qui régit l'ordre de succession sur le trône (le fils aîné devient monarque de par la loi et non par héritage) et pose le principe de l'inaliénabilité des biens et droits de la Couronne.

Jean Bodin
a joué un rôle important en tant qu'auteur des Six livres de la République (1576), le premier ouvrage de droit public en langue française. Pour Bodin la forme idéale d'Etat est une monarchie absolue centraliste à la fois tolérante en matière de religion et qui se situe au-dessus des partis religieux. Il réagit ainsi aux guerres civiles et conflits religieux incessants entre catholiques et protestants (comme par exemple le massacre de la St-Barthélémy en 1572).

Source Internet [16] (texte)

Source Internet [17] (portrait)

Selon Bodin il existait donc certaines barrières au pouvoir du souverain, mais celui-ci n'était soumis à aucun contrôle juridico-institutionnel indépendant. Il ne devait rendre de comptes au sujet de ses actes qu'à Dieu et à sa propre conscience. Personne en-dehors de Dieu n'avait le droit de surveiller le respect par le roi des limites de son pouvoir et encore moins de le contraindre à ne pas les dépasser. Cependant la responsabilité religieuse avait à cette époque encore une très forte valeur dans la conscience des gens.

Si déjà l'exposé de Bodin sur les limites du pouvoir du souverain laisse entrevoir qu'il s'agirait d'une interprétation extrêmement unilatérale de son œuvre que de voir en lui seul le précurseur de la théorie "moderne" de la souveraineté ainsi que le théoricien de la monarchie absolue, un rapide coup d'œil à son idéal de forme de l'Etat, c'est-à-dire la monarchie royale, suffit à faire ressortir encore plus clairement le fondement modérément conservateur de ses théories politiques. C'est dans cette monarchie royale ou légitime qu'est le plus à même de se réaliser son postulat principal (qui se retrouve tout au long de son œuvre) d'une souveraineté au sens de "droit gouvernement", une forme de gouvernement et d'organisation de l'Etat soumise au Droit et garantissant la sécurité juridique. C'est par la garantie de la sécurité juridique générale, par une politique qui certes n'accorde pas de fonctions de décision et encore moins de contrôle aux établissements et organes des ordres (sauf en ce qui concerne le droit de consentir à la levée de nouveaux impôts), mais leur laisse cependant la possibilité de participer aux tâches générales d'administration, en bref par l'introduction et l'assurance d'une relation de confiance durable entre prince et sujets, que la "monarchie légitime" peut être réalisée et assurée. Dans cette mesure, c'est avec raison que l'idéal de Bodin a été qualifié de "modèle raffiné d'intégration sociale". [16 [18] ]

Dans la France des guerres civiles et de religion de la seconde moitié du XVIème siècle et de la crise de la dynastie et de la société liée à celles-ci, le large consensus entre la Couronne et les sujets, la stabilité et l'harmonie de la monarchie royale étaient fortement ébranlés. Dans ce cadre, l'idée de souveraineté développée par Bodin, ses conceptions de la royauté absolue, souveraine, apparaissent surtout comme une réaction au syndrome de la crise touchant la monarchie de la Renaissance, la monarchie royale.

Mais le concept du prince souverain élaboré par Bodin se distingue nettement tant en théorie qu'en pratique de l'image qu'offrait la monarchie absolue du XVIIème siècle. Certes aussi bien les rois français que les théoriciens de la monarchie absolue n'ont non seulement pas remis en cause les limites du pouvoir du souverain postulées par Bodin, mais ont même sans cesse souligné leur caractère obligatoire, y compris pour le monarque absolu d'alors. Cependant une analyse plus poussée des écrits des théoriciens et des pratiques politiques des rois français laisse apparaître qu'à partir de la fin du règne d'Henri IV, l'image du souverain régnant s'est peu à peu transformée, passant d'un prince modéré à un roi absolu, et ce tant dans les théories politiques que dans la pratique du pouvoir.

On constate qu'à partir des premières décennies du XVIIème siècle, tant dans les écrits des théoriciens du droit public que dans les propos politiques, la notion de droit divin joua un rôle de plus en plus important dans la justification de la royauté absolue, dans l'élévation de la position du monarque. Les partisans du droit divin, s'appuyant sur le chapitre Romains 13 [19] du nouveau Testament, partageaient l'opinion selon laquelle le roi aurait été investi sur le trône directement par Dieu et toute puissance étatique découlerait de Dieu directement et sans instance intermédiaire.

"Droit divin"
L'opinion selon laquelle un homme aurait reçu sa fonction de Dieu concernait au moyen-âge tout d'abord les évêques. Plus tard, cette justification fut reportée sur les rois dans le domaine de leur pouvoir séculier. Après la Réforme, les souverains séculiers de la monarchie absolue élargirent cette conception et se considéraient comme élus de Dieu afin qu'ils puissent régner dans les deux domaines (ecclésiastique et séculier) sans contrôle séculier et sans être lié à une instance intermédiaire.

Source Internet [20]

De par la réception de la doctrine du droit divin, la royauté française connut un renforcement considérable de son pouvoir et la puissance étatique souveraine atteignit son plus haut degré. Louis XIV [21] aussi, de même que les théoriciens politiques et les apologistes qui l'entouraient, avait repris à son compte les théories du droit divin. Même si le principe d'une délégation directe du pouvoir par Dieu aux monarques n'est pas cité expressément dans les écrits du roi, les allusions et preuves très nombreuses que l'on y trouve ne laissent aucun doute sur le fait qu'il avait sans aucune réserve repris à son compte la doctrine du droit divin. Cette évolution s'écartant de la royauté modérée fut cependant l'objet de critiques dès la première moitié du règne personnel de Louis XIV, donc entre 1661 et les années 1680.

Cette évolution eut également des retombées dans d'autres domaines. Elle apparaît ainsi clairement dans la croissance dès les années 1630 de l'importance des pouvoirs extraordinaires du monarque que lui reconnaissaient les théoriciens de la monarchie absolue en cas menace extrême de l'Etat, menace dont le roi lui-même jugeait de l'existence dans le cas concret. Au nom de la raison d'Etat et dans l'intérêt du salut public, il avait le droit de franchir les limites de son pouvoir: Necessitas omnem legem frangit, "La nécessité n'a pas de loi", ainsi la formule du théoricien Cardin Le Bret [22] au cours de la Guerre de Trente Ans (1618-1648).

D'une manière générale, on constate que les principes de la monarchie royale, monarchie modérée, monarchie de la Renaissance, si chers à Bodin n'étaient au XVIIème siècle tant pour les théoriciens que pour les praticiens du gouvernement et de l'administration plus que de second ordre. Dans la monarchie absolue française, qui fut au XVIIème siècle confrontée à de longues périodes de guerre (avec seulement quelques courtes interruptions), le consensus entre le roi et ses sujets né du respect des droits et privilèges des groupes sociaux existait de moins en moins, car en politique le principe de la raison d'Etat dominait, le "régiment d'urgence" justifiait le recours aux pouvoirs extraordinaires du roi et par là les atteintes aussi bien à la propriété privée des sujets qu'aux privilèges et libertés des organes et forces politiques autonomes, et parce que l'Etat fut mystifié et élevé au-dessus des sujets dans une mesure jusque-là inconnue. Le titre et la pratique des règnes de Louis XIII à Louis XIV - et avec certaines restrictions aussi déjà sous Henri IV - ne correspondaient plus à l'idéal traditionnel du prince de la monarchie modérée, de la monarchie de la Renaissance.

Jean-Baptiste Colbert [23] (*1619 - †1683)
fut le ministre des finances et de l'économie de Louis XIV. Il était partisan des théories du mercantilisme. Il considérait une balance du commerce extérieur active comme la source la plus importante de la richesse nationale. Il essaya d'éviter au pays des importations coûteuses par le soutien et la création de manufactures. Il veilla par ailleurs à la diminution des barrières douanières. Il mit en place des intendants dans les diverses unités administratives. Afin de mieux atteindre les matières premières dans les colonies, il fit renforcer la flotte.

Source Internet : Texte [24] / Portrait [25]

Cette évolution eut bien entendu des répercussions sur l'organisation politique, laquelle fut à partir du XVIème siècle - mis à part quelques courtes interruptions - de plus en plus empreinte d'efforts de centralisation [26] de la part de la couronne. Il ne faut cependant pas surestimer les effets de ces derniers dans la pratique, car de nombreux obstacles que même la monarchie absolue elle-même ne put surmonter s'y opposaient. Même un Louis XIV préférait en politique intérieure des solutions basées sur un consensus avec les personnes concernées; mais il ne tolérait pas davantage que ses prédécesseurs de résistance ouverte. L'objectif le plus distingué de la monarchie absolue française était de faire régner l'ordre et l'harmonie dans le royaume, de garantir le fonctionnement efficace des pouvoirs publics, en bref: de bien diriger l'Etat. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre la "maxime de l'ordre" de Louis XIV et de son célèbre ministre Jean-Baptiste Colbert [27] (1619-1683). Tout ce qui servait à atteindre ce but fut non seulement conservé, mais aussi développé. Le roi français, monarque absolu, était l'arbitre suprême vis-à-vis des pouvoirs concurrents et des groupes sociaux. Le monarque absolu, arbitre suprême, avait pour devoir et droit essentiels de maintenir la cohésion de la mosaïque des corporations, ordres et sous-ordres composant l'Etat, ce qui était tout à fait compatible avec le respect des privilèges et droits particuliers des groupes ayant un certain statut. La monarchie absolue elle aussi s'appuyait toujours sur ces élites lorsque celles-ci contribuaient à faire régner l'ordre dans le pays; mais elle les combattait énergiquement quand elles menaçaient la réalisation des devoirs et objectifs essentiels du roi.

Jules Mazarin [28] (*1602 - †1661)
Mazarin travaillait depuis 1640 pour Richelieu, et ce fut peut-être la raison pour laquelle il fit changer son nom, car en réalité il s'appelait Giulio Raimondo Mazarini. Jusqu'alors nonce extraordinaire à la Cour du Roi, il devint cardinal en 1641. A la mort de Richelieu en 1642, il prit sa place au Conseil de la Couronne et dirigea à partir de 1643 l'ensemble de la politique française. Pendant la Guerre de Trente Ans et dans les années qui suivirent, il poursuivit en politique extérieure l'objectif d'affaiblir autant que possible les deux branches de la Maison des Habsbourg, c'est-à-dire la branche espagnole et la branche autrichienne.

Source Internet [29]

Lorsque après la mort de son "ministre principal", le Cardinal Jules Mazarin [30] , en mars 1661 Louis XIV, contre toute attente, ne nomma pas de nouveau Premier Ministre, il souhaitait par là montrer au monde entier sa résolution d'exercer lui-même dans toutes les affaires politiques de l'Etat le pouvoir de décision revenant à la Couronne. Il devint en quelque sorte son propre Premier Ministre. Il avait pour conseillers les ministres, les secrétaires d'Etat et dans une certaine mesure le Chancelier: ils étaient les seuls à participer d'une manière tangible aux processus de décision politiques et à jouer un rôle important dans les diverses sections du Conseil du Roi. Le roi exclut en grande partie les membres de la haute noblesse de la participation aux affaires du gouvernement, sans cependant toucher aux privilèges économiques et sociaux de la noblesse. Il recrutait ses ministres et ses secrétaires d'Etat - mis à part quelques exceptions - dans la noblesse de robe ou dans la basse noblesse, mais pas dans la noblesse d'épée ou le haut clergé.

Louis XIV [31] le Grand, dit le Roi Soleil,
né le 5 septembre 1638 à Saint-Germain-en-Laye, mort le 1er septembre 1715 à Versailles, fils de Louis XIII et d'Anne d'Autriche. Louis grandit sous la régence de sa mère. Les impressions politiques de sa jeunesse furent marquées d'une manière décisive par la Fronde, soulèvement de la noblesse de 1648 à 1653, et l'ébranlement de l'autorité étatique de la monarchie. S'appuyant sur les grands succès des ministres-cardinaux Richelieu et Mazarin en politique extérieure (Traité de Westphalie en 1648, Traité des Pyrénées en 1659), en commençant à régner lui-même en 1661 Louis XIV donna à la monarchie absolue sa forme caractéristique et marquante de l'Europe du XVIIème siècle.

Louis XIV en costume de sacre
par Hyacinthe Rigaud, 1701
(L'original se trouve au Louvre)

Source Internet : Texte / Portrait

 

La réorganisation du Conseil du Roi (Mars-Avril 1661) effectuée par Louis XIV au début de son règne personnel (hiérarchisation des différents conseils selon leurs fonctions) avait pour objectif principal d'éliminer les influences et pouvoirs qui s'étaient par le passé révélées représenter une gêne sérieuse pour la Couronne. Ce processus, qui caractérisa la structure de base du Conseil du Roi jusqu'en 1789 sans modifications essentielles, toucha principalement la haute noblesse, dont les membres - mis à part quelques-uns - ne furent plus nommés dans les Conseils de gouvernement. Ces Conseils de gouvernement, avec au sommet l'organe le plus important: le Conseil d'En Haut, comptaient chacun moins de dix personnes: des ministres d'Etat, des secrétaires d'Etat, quelques conseillers d'Etat, des "maîtres des requêtes", des fonctionnaires supérieurs (officiers), le Chancelier ainsi que le Contrôleur général des finances (Colbert exerça cette charge à partir de 1665). Les séances des Conseils de gouvernement étaient présidées par le roi, du moins en principe. Ce n'était pas le cas des Conseils des affaires d'administration et de justice, présidés par le Chancelier.

Les représentants traditionnels de la Couronne dans les provinces, les gouverneurs, qui par tradition appartenaient à la haute noblesse, furent également éloignés de leur province afin de leur enlever la base de leur pouvoir qui pourrait se révéler dangereuse. A partir de 1661, ils ne pouvaient se rendre dans leurs gouvernements que pour quelques semaines par an et ce uniquement avec l'autorisation expresse du roi. Les fonctions administratives et juridictionnelles encore occupées par les gouverneurs dans la première moitié du XVIIème siècle furent exercées de plus en plus par les intendants. Ces commissaires du roi, à tout instant révocables par le roi, mais qui appartenaient le plus souvent au vaste réseau de sa clientèle, jouèrent sous Louis XIV un rôle primordial en tant qu'instruments de la concentration administrative et du renforcement de l'autorité du roi dans les provinces.

Les provinces sous l'ancien régime avec leur
date de rattachement définitif à la France

 

Source Internet [32]

Une grande partie de l'administration royale était cependant toujours entre les mains des officiers (fonctionnaires royaux), lesquels avaient acheté leur office. Du fait de leur irrévocabilité et du caractère héréditaire de fait de leurs postes, les officiers se sentaient relativement indépendants de la Couronne et avaient développé un fort sentiment corporatif. Cela avait conduit à plusieurs reprises à leur opposition à des mesures du gouvernement, résistance entraînant elle-même des réactions de la part de la Couronne. C'est pourquoi à la fin du règne de Louis XIII cette dernière tendit de plus en plus à restreindre le prestige, mais surtout les compétences des officiers de justice et des finances et à transférer ces compétences à d'autres organes et personnes plus fortement dépendants du roi, notamment aux sections du Conseil du Roi et aux intendants. Mais malgré ces mesures de réforme, pour mener à bonne fin sa politique et veiller à ses intérêts même Louis XIV continuait à dépendre de son vaste réseau de relations de patronage, ce qui montre une fois de plus qu'il existait des limites au pouvoir du monarque absolu.

L'organisation moderne et le perfectionnement de l'armée sous Louis XIV, laquelle devint ainsi un instrument plus efficace de l'offensive politique et militaire, fut pour l'essentiel l'œuvre du Ministre de la Guerre Michel Le Tellier (1603-1685) et de son fils François-Michel Le Tellier, Marquis de Louvois (1641-1691). Non seulement ils organisèrent une administration de l'armée adaptée à son époque qui reposait également surtout sur les gens de robe, mais encore ils modernisèrent également la formation et la carrière des officiers et améliorèrent la discipline et l'équipement. De récentes recherche sur l'extension de l'armée française sous Louis XIV ont révélé que sa force effective a sans cesse augmenté à partir de 1661. En 1667 elle comptait environ 76.000 hommes, en 1675/78 ce chiffre était déjà passé à 273.000, pour atteindre son maximum en 1695/97 avec 340.000 hommes. Pendant la guerre de la Succession d'Espagne (1701-1713/14), l'armée ne comptait plus qu'environ 255.000 soldats.

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